L'école à l'hôpital
« Dans la mesure où leurs conditions d’hospitalisation le permettent, les enfants en âge scolaire ont droit à un suivi scolaire adapté au sein des établissements de santé », affirme la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. A l’heure actuelle, environ 11 000 élèves par an sont scolarisés dans les établissements sanitaires. Concrètement, comment se déroulent les cours dispensés à l’hôpital ? Quels ponts existent entre l’école et le milieu hospitalier ? Eléments de réponse.
Les services déconcentrés de l’Education nationale organisent, depuis les années 70, la scolarisation des enfants et adolescents hospitalisés. Un nombre important d’hôpitaux est d’ailleurs en lien avec un ou plusieurs établissements scolaires. Pour cela, près 800 enseignants sont mobilisés chaque année.
C’est le cas au centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes par exemple dans lequel les trois enseignants de primaire spécialisés et les deux professeurs de collège et de lycée dépendent de l’Education nationale. Les enseignants prennent en charge les enfants de l'ensemble des services de pédiatrie, de la grande section de maternelle à la classe de Terminale. Priorité est donnée aux plus longs séjours et aux pathologies qui auront le plus de retentissement sur la scolarité. Les enseignements portent en premier lieu sur le français et les mathématiques, puis, en fonction de la fatigue de l’enfant, ils s'élargissent aux sciences et à l'histoire-géographie. Un temps est également laissé aux activités éducatives et culturelles. Le travail réalisé à l’hôpital est par ailleurs pris en compte dans le cursus scolaire de l'élève : les notes peuvent être validées, certains examens nationaux comme le Baccalauréat peuvent être passés au CHU.
Concrètement, les enfants les plus en forme viennent en classe, les autres reçoivent leurs cours dans leur chambre. Dans l’hôpital des enfants, l’école de l’hôpital de Nantes dispose de deux classes : l’une au 3e étage dans le service de chirurgie et l’autre au 5edans le service d’oncologie pédiatrique.
Hormis les cours à distance dispensés par le Centre national d’enseignement à distance, le Cned, il existe des solutions associatives variables selon les départements. L’Ecole à l’hôpital en est un parfait exemple en Ile-de-France.
L’association a été fondée il y a plus de 80 ans par une enseignante de philosophie, Marie-Louise Imbert, qui estimait qu’on ne s’occupait pas assez des enfants hospitalisés pour d’assez longues périodes. Or, pour elle, un enfant vit beaucoup par et pour l’école. Aujourd’hui, l’association, qui est membre de la Fédération pour l’enseignement des malades à domicile et à l’hôpital, la FEMDH, a reçu l’agrément de l’Education nationale.
A l’hôpital Necker-Enfants malades (Paris) par exemple, l’association* travaille en étroite collaboration avec le centre scolaire de l’Education nationale. « Nous avons presque 40 enseignants bénévoles, déclare la coordinatrice de l’association pour l’hôpital, Véronique Motel, qui dispensent gratuitement leurs cours de manière individuelle au chevet de l’enfant ». Ce qui est le plus difficile, c’est l’organisation des cours en raison des temps d’hospitalisation assez courts et du développement de l’hôpital de jour pour des maladies chroniques. « Nous sommes centrées sur les matières scolaires comme le français, les mathématiques, les langues, la physique-chimie, etc. » ajoute Véronique Motel. « Chaque jour, les instituteurs font le tour des services. Ils prennent en charge les enfants qui sont en primaire et me contactent pour les plus grands. En tant que coordinatrice, je rencontre chaque enfant pour comprendre son besoin, expliquer notre démarche et briefer les professeurs. Ces derniers remplissent des fiches de suivi visibles par l’Education nationale pour assurer une cohérence dans la démarche d’aide à la scolarité », explique-t-elle. Les enseignants sont recrutés en fonction de leurs compétences mais aussi et surtout de leur motivation.
Si l’état de santé de l’enfant ne lui permet pas de retourner à l’école après son hospitalisation, il est possible de mettre en place un dispositif assurant une assistance pédagogique à domicile. C’est le rôle des services d’aide pédagogique à domicile, les SAPAD. A Nancy, le service du SAPAD départemental se trouve dans les locaux de l’hôpital pour enfants. David Leblond, le coordinateur du SAPAD 54 pour le secondaire repère, avec les enseignants, les enfants qui pourraient avoir besoin, après leur hospitalisation, d’une aide pédagogique à domicile de plus de 15 jours. Il s’agit surtout d’enfants des services psychiatrie et hématologie-oncologie. « Dès l’entrée d’un enfant dans le service, nous rencontrons l’enfant et sa famille et montons un dossier que nous envoyons au médecin référent de la direction des services départementaux de l’Education nationale, la DSDEN », explique David Leblond. « Selon moi, beaucoup de dossiers sont montés parce que les établissements scolaires n’ont pas les normes nécessaires à l’accueil d’enfants en fauteuil roulant. C’est gênant parce que l’école à domicile est un concept très intéressant mais assez dé-sociabilisant », analyse le coordinateur. « Dès qu’un dossier SAPAD est accepté, je contacte le chef d’établissement pour savoir si des professeurs de l’enfant sont disponibles pour donner des cours au domicile de l’élève, des cours payés en heures supplémentaires. Si ce n’est pas le cas, je me tourne ensuite vers les autres professeurs de l’établissement puis vers les établissements aux alentours », détaille David Leblond. Dans le département de la Meurthe-et-Moselle, 94 dossiers SAPAD ont été montés en 2011, 27 pour le primaire, 39 pour le collège, 19 pour le lycée général et 9 pour le lycée professionnel.
*L’association L’Ecole à l’hôpital est aussi amenée à travailler en partenariat avec les services SAPAD, lorsque la réponse institutionnelle reste incomplète ou impossible. Des temps d’échange ou de rencontre avec les coordonnateurs SAPAD permettent alors d’évoquer les différentes situations d’élèves et d’élaborer les projets de scolarité à domicile. Certains projets sont organisés conjointement, les élèves sont scolarisés à temps partiel avec l’Education Nationale, soit à domicile avec les enseignants du SAPAD, soit en classe dans leur école d’origine et partageront l’autre temps partiel avec l’Ecole à l’Hôpital. D’autres élèves sont pris en charge à 100 % par l’Ecole à l’Hôpital. Chaque projet commence par une visite de la responsable à domicile de l’Ecole à l’Hôpital en vue de connaître l’élève et sa famille, créer un lien avec l’équipe médicale hospitalière, préciser l’objectif des cours, le lien indispensable avec l’établissement scolaire d’origine, l’échéancier de supervision du projet, la validation des travaux de l’élève, la préparation aux examens, et enfin, cibler les enseignants correspondant le mieux au projet de l’élève. Un partenariat doit se mettre en place autour du jeune : échanges entre les informations que l'Ecole à l'Hôpital obtient des services médicaux et que l'Education Nationale obtient des établissements scolaires. Lorsque les responsables SAPAD organisent une équipe éducative dans l’établissement scolaire du jeune cela facilite les liens avec les enseignants de l’Ecole à l’Hôpital pendant la période de suivi scolaire à domicile. |