Internet, l'hôpital et les enfants
Dix ans après le colloque « Internet et l’enfant à l’hôpital », a été lancée, en 2011, l’année des patients et de leurs droits. Une année au cours de laquelle les jeunes patients ne manqueront pas d’exprimer leurs attentes, notamment celle d’un hôpital connecté. Au propre comme au figuré.
Comment réduire l’écart entre la vie à l’extérieur de l’hôpital et la vie des jeunes patients à l’intérieur de l’hôpital ? Comment faire de l’hôpital un lieu de vie en plus d’un lieu de soins afin de faciliter l’hospitalisation, souvent de longue durée, des jeunes patients?
Quel intérêt les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) peuvent-elles représenter dans le contexte de l’hôpital ?
Internet occupe, par les multiples possibilités qu’il offre, une place de choix dans les activités des enfants et des adolescents. Près de 9 élèves du primaire sur 10 vont au moins une fois par semaine sur le web et 77 % se connectent tous les jours.
Et, pour 75 % des adolescents, disposer d’Internet est important pour se sentir intégré dans la société.
Les principaux usages de l’outil concernent :
- le divertissement (films, musiques, jeux) ;
- la communication (messagerie instantanée, réseaux sociaux, forums) ;
- l’apprentissage (recherche d’informations).
On peut donc dire qu’Internet exerce une triple fonction ludique, sociale et éducative pour les adolescents et les enfants.
Pour les très nombreux enfants hospitalisés (on compte 1 126 million d’hospitalisations de patients âgés de 5 à 18 ans en 2009), l’absence de l’outil Internet constitue un véritable manque. Et ce d’autant que l’hospitalisation constitue une période de déstabilisation marquée par la souffrance mais aussi par l’isolement et l’ennui.
C’est au cours de la dernière guerre mondiale que la question du bien-être de l’enfant hospitalisé a commencé d’apparaître. Il faut rappeler que les progrès de la médecine (découverte et usage des antibiotiques) permettaient de ne plus se centrer sur la seule question de la survie des jeunes patients hospitalisés.
Il y a eu une forte prise de conscience du fait que l’hospitalisation était une souffrance et une souffrance hétérogène en fonction de l’âge de l’enfant. Schématiquement, on peut dire que les bébés souffrent de la séparation, que les enfants en période œdipienne vivent l’hospitalisation comme une punition et que les adolescents subissent une blessure narcissique. Ces découvertes ont débouchés sur la présence de psychologues dans les services pédiatriques.
Peu de choses étaient toutefois faites pour venir à bout de l’ennui des enfants. La fonction de divertissement ponctuel était confié à quelques bénévoles. Il restait encore à inventer au sein même de l’hôpital une manière d’être relié aux autres et au monde.
C’est d’abord l’école qui est entrée à l’hôpital : 11 000 élèves par an sont scolarisés dans les établissements hospitaliers et sanitaires. Mais tous les programmes ne sont pas enseignés et tous les enfants ne peuvent pas forcément se rendre aux cours compte tenu de la gravité de leur état.
Les loisirs aussi ont fait leur apparition à l’hôpital : 142 services de pédiatrie disposent au moins d’un(e)éducateur(trice)/ animateur(trice) et 14 des 18 établissements de longs séjours ont au moins un éducateur(trice) en pédiatrie.
L’outil Internet par ses différentes fonctions ludiques, sociales, éducatives pourrait bien faire partie de l’accompagnement non médicalisé qui est d’ailleurs inscrit à l’article 7 de la Charte de l’enfant hospitalisé : « L’hôpital doit fournir aux enfants un environnement correspondant à leurs besoins physiques, affectifs et éducatifs, tant sur le plan de l’équipement que du personnel et de la sécurité ».
L’accompagnement non médicalisé contribue à la guérison de l’enfant dans la mesure où il a une vocation thérapeutique : l’apprentissage, les loisirs, les échanges sociaux permettent au jeune de ne pas se voir comme réduit à sa maladie. Pour le psychiatre Michael Stora, Internet permet de faire sortir les jeunes de l’hôpital et de leur faire oublier un moment leur(s) pathologie(s). Ce spécialiste des jeux vidéo insiste sur le fait qu’à travers le jeu, les patients peuvent mieux intégrer leur hospitalisation car ils s’affranchissent d’un état déplaisant.
Le jeu permet de se plonger dans un univers magique dans lequel le patient est autonome. S’il se crée un avatar, il pourra le mettre en scène en bonne santé et restaurer ainsi la blessure narcissique que peut constituer l’hospitalisation.
Aujourd’hui, le besoin d’un accès sécurisé à Internet pour les jeunes patients est un souhait largement partagé. Reste à en définir les modalités car ce service – souvent porté par des associations ou des entreprises mécènes – n’est pas dans les budgets ni parfois dans les priorités de l’hôpital.
Parmi les 83 % d’établissements possédant un ordinateur portable, seuls 66 établissements possédant un ordinateur portable offrent la possibilité aux jeunes patients d’utiliser dans leur chambre soit 27 % de l’ensemble étudié. La moyenne du nombre d’ordinateurs est inférieure à un ordinateur pour dix chambres.
L’ensemble des besoins représente environ 7500 ordinateurs répartis dans les 270 établissements pédiatriques.
Depuis 2003, l’association Docteur Souris, présidée par Roger Abehassera, alors directeur général adjoint de Microsoft France, a équipé 80 structures pédiatriques dans 12 hôpitaux différents. En septembre 2010, a vu le jour le projet le plus ambitieux réalisé jusqu’alors. L’équipement, avec 200 ordinateurs portables, de 10 services pédiatriques. Cela s’est passé à l’hôpital de La Timone à Marseille.
Quels sont les points forts du programme Docteur Souris ?
Partant du principe que les animations (scolaires ou extrascolaires) ne durent, à l’hôpital, que quelques heures et n’ont lieu que dans quelques structures, partant également du principe que la société française est une société connectée, l’Association a lancé un programme technologique et relationnel.
Le programme permet en effet aux enfants et adolescents hospitalisés de bénéficier à l’hôpital d’un ordinateur portable, d’un accès Internet et mail sécurisé ainsi que de contenus interactifs attractifs.
Le dispositif mis en place par Docteur Souris est sécurisé, pérenne et utilisable 24h/24. Les ordinateurs portables donnés aux jeunes hospitalisés sont équipés d’Internet, d’une webcam, d’une messagerie instantanée… Les enfants hospitalisés ayant accès à Docteur Souris étant recensés dans un annuaire électronique, ils peuvent communiquer entre eux.
L’utilisation de l’ordinateur peut se faire dans la chambre, en toute intimité.
Le réseau est sans fil pour simplifier l’implantation dans l’hôpital et ne pas câbler les chambres.
L’administration du système est simple afin de pouvoir être gérée par le personnel référent qui est formé avant le lancement du projet. Le personnel crée ainsi les comptes des enfants et des adolescents, paramètre les messageries et les accès sécurisés…
Des étudiants en école d’ingénieurs sont recrutés chaque année en tant que stagiaires pour assurer la maintenance des ordinateurs et le développement du programme.
Le dispositif est bien encadré puisqu’une autorisation parentale est demandée et puisque le système est contrôlé par le biais d’un ordinateur central sécurisé.
Quel bénéfice pour les enfants hospitalisés ? Ils se distraient, jouent, gardent un lien avec leurs proches, familles ou amis, étudient grâce à des modules interactifs. Il faut dire que le suivi scolaire est un des points forts du projet. Grâce à un partenariat avec Paraschool, Docteur Souris a pu nourrir son portail d’un programme complet allant du primaire jusqu’au Baccalauréat sur les matières principales.
Le projet d’équipement pour 2011-2016
L’association fait également des propositions pour mettre en place un plan d’équipement de l’ensemble des services pédiatriques français. Selon les estimations, pour le prix d’un café par jour d’hospitalisation, il serait possible de réaliser cet équipement.
Il faut dire que 75 % des établissements interrogés dans le cadre du Baromètre Docteur Souris se disent intéressés par la mise en place d’une solution équivalente à celle qui a été proposée jusqu’alors par Docteur Souris. 55 établissements sur les 248 de l’étude disent même avoir un projet d’équipement en cours.
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