Si votre enfant a mal
Face à l'enfant qui a mal, nous sommes souvent désemparés. Nous désirons l'aider, mais ne savons pas toujours comment faire. Il ne s'agit ni de refuser notre aide à l'enfant quand il a mal, ni de répondre systématiquement à toute plainte par un médicament, mais de connaître les meilleures solutions pour éviter et soulager la douleur quand c'est nécessaire.
Voir également le " Contrat engagement douleur " sur le site du ministère de la santé
La douleur n'est pas facile à définir. Selon l'Association internationale d'étude de la douleur (IASP), la douleur est "une expérience désagréable, émotionnelle et sensorielle, liée ou non à un dommage tissulaire ou décrite par le patient en de tels termes".
La prise en charge de la douleur évolue, grâce aux équipes médicales, mais aussi grâce à la détermination des parents qui réclament des améliorations et cherchent de leur côté les solutions qui évitent ou limitent la douleur (par exemple, en préférant un désinfectant qui ne pique pas...).
Les "bobos" de la vie quotidienne : les enfants jouent et explorent, et cela ne va pas sans quelques rencontres douloureuses. Ils apprennent leurs propres limites et les dangers du monde extérieur. Ils apprennent à connaître les sentiments qui accompagnent souvent la douleur : tristesse, culpabilité, solitude, colère... L'enfant qui est tombé pleure parce qu'il s'est fait mal, mais aussi parce qu'il est déçu et vexé d'avoir échoué dans son élan. Enfin, la douleur peut être l'occasion d'expérimenter le courage, la maîtrise et la joie du réconfort...
Les douleurs liées à la maladie : certaines maladies de l'enfance provoquent des douleurs qui attirent l'attention et peuvent aider le médecin dans son diagnostic. Mais une fois le message "douleur" reçu, il ne sert à rien de le faire durer. Douleur n'est pas toujours synonyme de gravité : il y a de fortes douleurs dont les causes sont simples, et par contre, certaines maladies sérieuses ne font pas mal.
Les douleurs provoquées : il y a des situations où les médecins et les infirmières savent que l'enfant va avoir mal ou qu'ils seront obligés de lui faire mal (par exemple : les points de suture, les piqûres, les opérations...). Ces douleurs sont explicables, elles ne sont pas pour autant "normales". Lorsqu'elles sont prévisibles, il est très souvent possible de donner un traitement pour les éviter ou les soulager.
Chaque fois qu'une douleur est assez intense ou prolongée pour empêcher les activités habituelles de l'enfant, il faut la traiter. Pour cela, il faut d'abord la mettre en évidence, la localiser, l'évaluer.
Les enfants on parfois des difficultés à dire où, comment, "combien" ils ont mal. Parfois, ils croient qu'ils n'ont pas besoin de le dire parce que, pour eux, leur corps est "transparent" et les adultes peuvent "voir" ce qu'ils éprouvent.
Devant la douleur, chacun est différent, certains enfants se plaignent, d'autres moins et il faut arriver à accepter, sans juger, ces différences de réaction. Ce n'est pas un signe de faiblesse de dire que l'on a mal, cela ne signifie pas que l'enfant est "douillet", et rares sont les enfants qui font semblant.
Parfois, un enfant peut avoir tellement mal qu'il devient incapable de réagir. On risque alors de se tromper et de croire qu'il est simplement triste, calme ou même sage ! (les soignants parlent alors d'atonie psychomotrice). Pourtant, si on lui donne des médicaments contre la douleur, il recommencera à parler, à bouger, à jouer, à s'intéresser aux autres.
Les nouveau-nés et les bébés ressentent aussi la douleur et ils s'en défendent moins bien que les adultes. La mémoire de la douleur existe, même chez les tout-petits : après une paracentèse (piqûre dans le tympan lors d'une otite), le jeune enfant craint pour longtemps "les blouses blanches".
Si votre enfant doit faire face à une maladie ou à des soins douloureux, vous avez un rôle important à jouer. Vous êtes les mieux placés pour aider votre enfant à transmettre ce qu'il ressent, l'accompagner et lui expliquer la situation.
On supporte mieux les douleurs dont on connaît le sens, et l'enfant qui ne comprend pas ce qui lui arrive peut se sentir coupable de souffrir. C'est pourquoi vous devez vous informer sur la prise en charge de la douleur, les moyens disponibles, leurs bénéfices et leurs éventuels inconvénients. Il existe aujourd'hui toute une gamme de traitements adaptés à de nombreuses situations, des plus bénignes aux plus sévères, et on peut toujours faire quelque chose en combinant plusieurs moyens.
La douleur est une expérience subjective. A l'hôpital et dans les consultations de la douleur, on utilise différentes techniques pour la rendre plus objective. On peut ainsi la quantifier et connaître l'efficacité des traitements.
Le " dessin du bonhomme " aide l'enfant à préciser où il a mal. On lui propose de "dessiner" l'endroit où il a mal sur deux schémas qui représentent un corps de face et de dos. Tout d'abord, il choisit quatre couleurs pour désigner quatre intensités de douleur (légère, moyenne, forte, très forte). Ensuite, il dessine sa douleur sur le support.
La réglette : c'est un outil qui permet à l'enfant d'indiquer lui-même l'intensité de sa douleur. On lui demande de placer le curseur "aussi haut que sa douleur est grande". Sur le verso de la réglette, une graduation de 0 à 10, destinée aux soignants, permet de chiffrer la douleur et de déterminer le traitement adéquat. Les enfants sont capables de l'utiliser à partir de 5-6 ans. Il existe également un modèle de réglette avec 6 visages, sur laquelle l'enfant doit montrer le visage qui correspond à sa situation. Ce modèle peut être utilisé dès 4-5 ans. On peut enfin tout simplement demander à l'enfant de donner une note à sa douleur, entre 0 et 10.
Parfois certains enfants craignent de donner une évaluation élevée par peur d’avoir une " piqûre ", un autre traitement, de devoir rester plus longtemps à l'hôpital, ou encore pour ne pas inquiéter leurs parents…
L'observation par les soignants : pour les plus jeunes enfants, ou les personnes handicapées, les soignants évaluent la douleur grâce à des échelles de comportement. Le soignant cherche à repérer les signes qui peuvent signifier une douleur : les pleurs, l'agitation, le rythme cardiaque, le sommeil, le besoin de réconfort, la difficulté à être consolé, le manque d’appétit ou d’intérêt, l’arrêt des activités habituelles...
Quand un enfant est trop douloureux, il est parfois nécessaire de commencer par lui donner des médicaments pour le soulager. Une fois l'enfant un peu apaisé, il sera alors possible pour les soignants d'évaluer sa douleur et de la soulager complètement.
Les moyens de soulager la douleur sont nombreux et complémentaires. Pour être efficace, il est souvent nécessaire d’en associer plusieurs.
L'information de l'enfant fait partie intégrante de la prise en charge de la douleur. Si votre enfant comprend ce qui se passe cela peut l’aider à avoir moins mal " Quand on a moins peur, on a moins ma ! "… l’enfant mal informé peut se sentir trahi et désarmé s’il a mal et qu’il n’a pas été prévenu, de plus on risque de perdre sa confiance. Il aura moins la capacité d’utiliser ses propres ressources pour limiter la sensation douloureuse.
Le soutien de l’entourage, la motivation, le sentiment de maîtriser une situation…, permettent de moins ressentir la douleur. Au contraire la maladie, l’inquiétude, le sentiment d’impuissance, l’incertitude, la dépression, l’anxiété…, peuvent exacerber les sensations douloureuses.
Détourner l’attention de l’enfant, grâce à divers moyens de distraction, permet de limiter la sensation douloureuse lors d’un soin. C’est aussi un atout pour examiner un enfant douloureux.
Le réflexe de frotter quand on se fait mal, soit l'endroit douloureux, soit juste à côté, est un puissant moyen pour inhiber les influx de douleur.
Le contact prolongé d'un bébé avec sa mère, l’allaitement, le peau à peau, produisent un état de bien être qui peut bloquer la perception douloureuse lors d’un geste douloureux. L’administration d’une solution sucrée (de saccharose ou de glucose), associée à la succion d’une tétine entraîne également une diminution de la perception douloureuse chez le nouveau-né (moins de 2 mois).
Des séances de relaxation ou d'hypnose thérapeutique sont proposées aux enfants et aux adolescents dans certains services. Ces deux techniques peuvent être utilisées aussi bien pour le traitement des douleurs chroniques, telles les migraines, que de certaines douleurs aiguës.
Le chaud et le froid peuvent soit favoriser la détente musculaire, soit entraîner une diminution des douleurs inflammatoires (par exemple la douleur dentaire).
Les médicaments qui agissent contre la douleur (on dit analgésiques ou antalgiques) sont classés en 3 catégories selon leur puissance. Ce sont les trois paliers décrits par l'Organisation Mondiale de la Santé.
Le palier 1 pour les douleurs légères à modérées : l'aspirine, le paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens, par exemple l'ibuprofène.
La plupart des médicaments du palier 1 peuvent être achetés sans prescription médicale (mais pas ceux des autres paliers). et un même médicament peut être vendu sous différentes marques. Pour que le traitement soit efficace, il faut respecter les doses et horaires prescrits par le médecin.
Le palier 2 pour les autres douleurs plus importantes : la codéine, la nalbuphine, le tramadol ou des associations de médicaments de paliers 1 et 2.
Le palier 3 pour les douleurs très intenses : la morphine. Les réticences à prescrire la morphine ont longtemps empêché les médecins de calmer les douleurs les plus fortes. Il est pourtant prouvé qu'elle ne rend pas toxicomane quand elle est utilisée pour traiter la douleur. Elle peut être donnée en sirop, en comprimé ou par injection. Dans certains cas, une "pompe d'analgésie contrôlée" permet au patient de s'administrer lui-même la quantité dont il a besoin (selon un maximum fixé par le médecin).
Pour certaines douleurs, même très intenses (crise de migraine, douleurs liées à une atteinte neurologique, douleur psychogène...), les médecins ne donnent pas de morphine ou de morphiniques (qui sont inefficaces ou dangereux dans ces indications) : ils proposent alors d'autres molécules ou d'autres solutions.
Ils permettent également d'éviter la sensation de douleur. Il en existe sous différentes formes.
L'injection : c'est par exemple la piqûre que le dentiste réalise dans la gencive avant le soin d'une dent. Cette technique est aussi utilisée dans d'autres situations comme les points de suture. La piqûre elle-même est parfois douloureuse.
Les sprays ou les gels sont efficaces sur les muqueuses (les gencives, l'intérieur de la bouche ou des narines...).
La crème anesthésiante "endort" la peau à l'endroit où l'on doit faire une piqûre. Elle est aussi utilisée pour certains actes en dermatologie, pour enlever des verrues ou des molluscums. Il faut en mettre une couche épaisse sous un pansement spécial, ou utiliser un "patch" (la crème est déjà sur le pansement), au moins une heure avant.
C'est un mélange d'oxygène et de protoxyde d'azote en quantités égales. Pour simplifier on dit "Proto" ou "MEOPA" (Mélange Equimolaire Oxygène Protoxyde d’Azote). Il n'a aucune odeur, comme l'air, et on le respire dans un masque. Il ne fait pas vraiment dormir mais il permet de supprimer ou d'atténuer la douleur lors de certains soins : points de suture, ablation de fils, pansement, ponction lombaire...
Pour aider votre enfant, l’association SPARADRAP propose plusieurs guides, des fiches illustrées ainsi qu’un espace ludique et pédagogique sur son site Internet.
Pour mieux comprendre comment votre bébé exprime sa douleur ou son inconfort, l'association SPARADRAP a également créé deux guides "Je vous parle, regardez-moi" et "Soins et examens douloureux : comment aider votre bébé ? ".